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Ukraine : pour Biden, Poutine est un "criminel de guerre", frappes meurtrières sur des civils
Joe Biden a traité mercredi Vladimir Poutine de "criminel de guerre", tout en promettant une aide militaire massive à l'Ukraine, où une vingtaine de civils ont été tués par des tirs russes devant un magasin, sur un marché et à l'intérieur d'un immeuble d'habitation dans le nord et en fuyant Marioupol dans le sud.
Répondant à une journaliste, le président américain a lâché, sans autres précisions, à propos de son homologue russe : "C'est un criminel de guerre".
Des propos "inacceptables et impardonnables", a répliqué le Kremlin.
Peu auparavant, dans une courte allocution, M. Biden avait confirmé que son pays fournirait 800 millions de dollars de plus au titre de l'aide militaire à Kiev, soit une enveloppe "sans précédent" d'un milliard de dollars en une semaine pour soutenir son armée.
"A la demande" du chef de l'Etat ukrainien Volodymyr Zelensky, qui s'était un peu plus tôt adressé au Congrès, "nous aidons l'Ukraine à se doter de systèmes de défense antiaérienne supplémentaires et de plus longue portée", a-t-il dit, précisant que des drones seraient aussi livrés.
- Des frappes meurtrières -
Dans cette même ville, qui subit de nombreux raids aériens, cinq corps, dont ceux de trois enfants, ont été retrouvés sous les décombres d'un logement collectif, ont dit les secouristes.
Trois autres personnes ont perdu la vie et cinq ont été blessées sur un marché dans un incendie provoqué par un bombardement à Kharkiv, dans le nord-est.
Dans l'après-midi, des tirs de roquettes Grad sur un convoi de civils qui quittaient la cité portuaire assiégée et sans cesse pilonnée de Marioupol ont fait un nombre pour le moment indéterminé de morts et de blessés, dont un enfant grièvement atteint, d'après l'armée ukrainienne.
Un théâtre qui abritait "des centaines" de civils" y a été détruit dans l'explosion d'une bombe larguée par un avion russe, a ajouté la mairie.
La ville de Zaporojie, largement épargnée jusqu'ici et refuge des personnes évacuées de Marioupol, a quant à elle pour la première fois depuis le début du conflit été visée, la gare ayant été touchée mercredi par au moins un missile. C'est dans cette région que se trouve la plus grande centrale nucléaire d'Europe, que les Russes occupent depuis le 4 mars.
"J'ai enterré mon fils aujourd'hui. C'était un pilote", dont l'appareil a été abattu pendant une mission de combat, racontait de son côté, tête baissée, Anatoly, à Otchakiv, sur les bords de la mer Noire.
Cinq cents personnes au moins ont été tuées depuis le début de la guerre à Kharkiv, la deuxième ville d'Ukraine, dans le nord-est, sans répit bombardée.
Des explosions ont en outre à nouveau été entendues à l'aube à Kiev où d'épaisses colonnes de fumées noires s'élevaient.
La capitale, vidée de plus de la moitié de ses 3,5 millions d'habitants, est sous couvre-feu depuis mardi 20H00 (18H00 GMT) et jusqu'à jeudi 07H00, après que plusieurs missiles eurent frappé des immeubles d'habitation lundi et mardi.
"En cas de besoin, nous prendrons les armes et nous défendrons la ville", a assuré Edouard Dementchouk, un employé d'une cinquantaine d'années d'une société de sécurité privée.
Conséquence du conflit, plus de trois millions d'Ukrainiens - dont près de la moitié d'enfants - ont déjà pris les routes de l'exil, en grande majorité vers la Pologne.
- Pas de troupes de l'Otan -
Dans le même temps, l'Organisation mondiale de la santé assurait n'avoir jamais vu autant d'attaques militaires sur le système de santé qu'actuellement en Ukraine.
"Le système de santé est devenu une cible (...). Cela commence à faire partie de la stratégie et des tactiques de la guerre. C'est totalement inacceptable, c'est contraire au droit humanitaire international", a déploré le chef des urgences de l'OMS, Michael Ryan.
C'est dans ce contexte que la Cour internationale de justice (CIJ), le plus haut tribunal de l'ONU, a ordonné mercredi à Moscou d'immédiatement interrompre ses opérations militaires en Ukraine, se disant "profondément préoccupée" par l'ampleur des combats ; et que le Conseil de l'Europe, garant de l'état de droit sur ce continent, excluait officiellement la Russie, tandis que la Cour européenne des droits de l'homme suspendait l'examen de toutes les requêtes concernant la Russie.
Imperturbable, Vladimir Poutine a martelé dans un discours que l'opération militaire déclenchée trois semaines plus tôt, le 24 février, était "un succès". Cela alors que son armée ne pouvait revendiquer la prise d'aucune grande ville et progressait au ralenti.
La Russie ne laissera jamais l'Ukraine devenir une "tête de pont" pour des "actions agressives" contre son territoire, a-t-il ajouté.
Juste avant, son homologue ukrainien avait par visioconférence, ovationné par les parlementaires américains, à nouveau réclamé l'instauration d'une zone d'exclusion aérienne au-dessus de son pays.
Il y a "la nécessité de protéger notre ciel", avait lancé Volodymyr Zelensky, avant de faire projeter des images des Ukrainiens sous les bombes.
Joe Biden a jusqu'ici rejeté l'idée de mettre en place une telle zone d'exclusion aérienne, de peur de voir les Etats-Unis et l'Alliance atlantique, qui a répété mercredi qu'il n'était "pas question de déployer des troupes de l'Otan ni des avions en Ukraine", entraînés dans un conflit susceptible de se transformer en 3e guerre mondiale.
Cette organisation a toutefois fait part de son intention de renforcer son dispositif sur son flanc oriental.
- Un "compromis" ? -
L'offensive et la détermination des deux camps n'empêchaient pas la poursuite en parallèle de pourparlers, relancés lundi par visioconférence au niveau des délégations.
Le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, a déclaré mercredi que les négociateurs discutaient désormais d'"un compromis", qui ferait de l'Ukraine un pays neutre, sur le modèle de la Suède et de l'Autriche.
"Il y a des formules très concrètes qui, je pense, sont proches d'un accord", a également souligné le chef de la diplomatie russe Sergueï Lavrov.
Sans démentir des discussions sur une neutralité, le négociateur-en-chef ukrainien Mykhaïlo Podoliak a rejeté "un modèle suédois ou autrichien" et insisté sur des "garanties de sécurité absolues" face à la Russie, avec engagement d'intervenir aux côtés de l'Ukraine en cas d'agression.
"L'Ukraine est maintenant en état de guerre directe avec la Russie. Par conséquent, le modèle ne peut être qu'+ukrainien+", a déclaré M. Podoliak sur son compte Telegram.
Le président Zelensky avait estimé dans la nuit de mardi que les positions des deux camps étaient désormais "plus réalistes", tout en estimant qu'il faudrait "encore du temps pour que les décisions soient dans l'intérêt de l'Ukraine".
Il s'était dit auparavant prêt à renoncer à toute adhésion de son pays à l'Otan, un casus belli pour la Russie.
M. Zelensky n'a pas caché qu'il espérait aussi obtenir une rencontre avec M. Poutine.
A l'issue d'une conversation, le pape François et le patriarche Kirill ont pour leur part exprimé "l'espoir d'arriver rapidement à une paix équitable".
Le chef de l'Eglise catholique a appelé celui de l'Eglise orthodoxe russe à éviter "le langage de la politique", selon le Vatican.
La Turquie, membre de l'Otan mais ayant refusé de s'associer aux sanctions contre Moscou, poursuivait de son côté ses efforts de médiation. Son ministre des Affaires étrangères Mevlüt Cavusoglu était à Moscou mercredi et devait se rendre jeudi en Ukraine.
Il succédera aux Premiers ministres polonais, tchèque et slovène, Mateusz Morawiecki, Petr Fiala et Janez Jansa, qui sont allés mardi à Kiev.
Parallèlement, la Pologne a réclamé la mise en place d'une "mission de paix" de l'Otan, "protégée par les forces armées" pour aider l'Ukraine.
Le sujet pourrait être abordé au cours du sommet extraordinaire de l'Otan prévu pour le 24 mars à Bruxelles, où Joe Biden sera présent.
Mercredi, Vladimir Poutine a promis des aides financières aux particuliers et aux entreprises, comparant les sanctions à un "Blitzkrieg" contre la Russie.
Les autorités russes continuent en parallèle à réprimer toute opposition à la guerre.
burx-bds/fjb
G.P.Martin--AT