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Ukraine: la vie à Vilkhivka, village libéré près de Kharkiv
Ukraine: la vie à Vilkhivka, village libéré près de Kharkiv / Photo: Dimitar DILKOFF - AFP

Ukraine: la vie à Vilkhivka, village libéré près de Kharkiv

Trois chars hors d'usage: deux russes, un ukrainien. La route menant à Vilkhivka, à l'est de Kharkiv (Ukraine), témoigne de la violence des combats qui ont vu les Ukrainiens repousser les Russes en direction de leur frontière et reprendre des villages occupés depuis le début de l'invasion ordonnée par Moscou.

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Symboliquement, l'inscription "Azov était là", avec le symbole du régiment ukrainien ressemblant à la croix gammée nazie, a été apposé sur un des chars à côté du "Z" qui y avait été peint par les troupes russes.

Des dizaines de maisons de ce village d'environ 2.000 habitants ont été éventrées par des obus, des explosions ou des incendies. On y découvre des habits, des jouets d'enfants, des appareils ménagers.... Les rues sont jonchées de débris, douilles de balles et autres restes de munitions. L'énorme école de deux étages a été ravagée par un incendie.

- "C'était l'enfer ici" -

Le corps d'un soldat russe était encore samedi dans le jardin de l'établissement alors que dans le gymnase, apparemment utilisé comme dortoir par les Russes, on découvre des caisses de munitions antichar vides, des sacs de couchage, des pâtes instantanées dans un capharnaüm où figurent aussi un ballon de basket et des livres scolaires.

Des détonations sont audibles régulièrement au loin, sans qu'on puisse savoir si ce sont des explosions provoquées par des démineurs ou des tirs d'artillerie.

Près de l'école, des volontaires distribuent de la nourriture à la poignée d'habitants qui sont restés. Les Russes occupaient le secteur depuis le début de la guerre le 24 février et leur offensive sur Kharkiv, raconte Edgard Andressovitch, un électricien qui n'a jamais quitté le village.

Selon lui, les Russes, qui étaient déjà présents, sont brusquement montés en puissance fin mars (certains habitants parlent du 26 mars, d'autres du 25 ou 24), investissant le village et notamment l'école. La plupart des habitants ont fui à ce moment-là.

"Les Russes nous ont dit: +Si votre armée ne tire pas, on ne tire pas+. Je leur ai demandé ce qu'ils faisaient là. Ils m'ont répondu +On libère+", assure-t-il.

Le lendemain, un déluge de feu s'abat sur la ville avec des combats intenses. "Petit à petit le village a été détruit. Trop d'obus. Si tu n'as jamais entendu ou vu ça, tu ne peux pas comprendre. Des maisons ont été effacées", s'insurge Lioubov Ivanivna, 70 ans. "C'était horrible".

"Pour être honnête c'était l'enfer ici. Nos maisons explosaient et brûlaient. J'ai sauvé la mienne en éteignant un feu", raconte Viktor Ivanovitch, légèrement éméché, se consolant des dégâts et de la peur avec de l'alcool.

Evguen Zagoumeny est lui revenu pour "reconstruire (sa) maison. Il faut bien qu'on vive quelque part. On ne va pas vivre dans le métro (de Kharkiv, où se sont réfugiés les habitants pour se protéger) pour toujours".

- Peur d'un retour russe -

Sergueï Bilinikhine, menuisier, est déjà au travail. "J'ai l'impression que je n'ai plus de maison. Il ne reste que les murs, plus de fenêtres ni de plafonds", dit-il après avoir cloué des planches en bois sur une fenêtre. "Si Dieu le permet, j'aurais fini avant l'automne".

"Pourquoi devrais-je être triste? Mes murs ont tenu, des voisins ont tout perdu... Ma famille est en vie, mes enfants (deux fils de trois et sept ans) sont en bonne santé", souligne-t-il.

Si les Russes sont partis, les habitants ne sont pas rassurés pour autant. La frontière n'est qu'à une trentaine de kilomètres et des troupes russes sont encore à une dizaine de kilomètres de Kharkiv.

"C'est tout près. Ils sont venus ici comme s'ils étaient à la maison. Je suis inquiet", concède Edgard Andressovitch, assurant toutefois qu'il restera "tant (qu'il) peut".

"Les Russes ne sont pas des bonnes gens. Si je vous dis ce que je pense, ça va faire +bip-bip-bip+ (bruit de la censure à la télévision). Ils peuvent revenir. Je suis inquiet. Ils continuent de tirer", lance Sergueï, qui n'a pas donné son nom. "Mais je suis né ici. J'ai grandi ici. C'est ma mère patrie. Je ne partirai pas. C'est toute ma vie".

O.Ortiz--AT