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CEDH: la Russie condamnée pour avoir "étouffé" les critiques de la guerre en Ukraine
CEDH: la Russie condamnée pour avoir "étouffé" les critiques de la guerre en Ukraine / Photo: Frederick FLORIN - AFP/Archives

CEDH: la Russie condamnée pour avoir "étouffé" les critiques de la guerre en Ukraine

"Une campagne" pour "étouffer les critiques" sur la guerre en Ukraine: la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH) a condamné mardi la Russie pour la répression des voix dissidentes sur le conflit, victimes de sanctions d'une "gravité exceptionnelle et disproportionnée".

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Dans un arrêt sévère, la Cour basée à Strasbourg (est de la France) a relevé de "multiples violations" de la Convention européenne des droits de l'homme et constaté "l'existence d'un schéma systémique et généralisé de restrictions aux reportages sur la guerre en Ukraine" révélant "un effort coordonné visant à faire taire les critiques" sur l'invasion lancée par le président russe Vladimir Poutine.

La juridiction européenne avait été saisie par 178 personnes condamnées en vertu des nouvelles dispositions légales imposées au début de la guerre, et par les médias indépendants Novaïa Gazeta et Dojd TV qui furent fermés, rappelle la Cour dans un communiqué.

Moscou a lancé ses troupes contre son voisin le 24 février 2022, une invasion qualifiée par M. Poutine "d'opération militaire spéciale".

- "Unanimité" -

Des restrictions concernant les reportages furent immédiatement instaurées et, le 4 mars 2022, de nouvelles dispositions légales furent adoptées, érigeant en infraction le fait de "discréditer" le déploiement des forces russes ou de "diffuser sciemment de fausses informations" à ce sujet, rappelle la CEDH.

Sur la base de cette législation nouvelle, de nombreuses personnes furent condamnées "pour avoir exprimé des opinions critiques" sur les actions militaires en Ukraine ou pour avoir diffusé des informations s'écartant "des comptes rendus officiels", poursuit la Cour.

Les sanctions allaient d'amendes administratives à des peines de prison, la plus importante étant infligée à l'opposant Vladimir Kara‑Mourza, condamné à 25 ans d'emprisonnement. Il a été libéré l'été dernier dans le cadre d'un échange de prisonniers.

Novaïa Gazeta, dont le rédacteur en chef Dmitri Mouratov est colauréat du Prix Nobel de la Paix 2021, et Dojd TV ont été fermés "en raison de leurs reportages sur la guerre", rappelle encore la CEDH.

Les tribunaux russes ont considéré comme des infractions pénales "tous les reportages et déclarations qui contredisaient le discours officiel" présentant "l'invasion de l'Ukraine (...) comme une +opération militaire spéciale+", pointe la juridiction européenne, qui a conclu "à l'unanimité" à la violation de l'article 10 (liberté d'expression) de la Convention.

Les autorités russes n'ont pas tenu compte "de l'intérêt crucial que revêtait pour le public le sujet en question, à savoir un conflit armé majeur et des allégations de crimes de guerre", pointe-t-elle.

"Les mesures dont les requérants ont fait l'objet (...) visaient un large éventail de formes d'expression, depuis les simples slogans pacifistes et les manifestations de soutien à l'Ukraine jusqu'aux reportages factuels sur des crimes de guerre allégués qui auraient été commis par l'armée russe", relève la juridiction, qui juge "particulièrement préoccupant que même l'expression inoffensive d'une solidarité envers un pays voisin attaqué et la population de celui-ci ait entraîné des poursuites".

- "Gravité exceptionnelle" -

Ces sanctions, d'une "gravité exceptionnelle et disproportionnée", constituaient "un message clair, destiné à intimider, à la société dans son ensemble" et s'inscrivaient "dans une campagne plus large visant à étouffer les critiques relatives" à l'invasion de l'Ukraine.

"Elles ont réduit au silence des voix indépendantes majeures de la société russe", s'émeut encore la Cour.

Les juges européens ont également conclu à plusieurs autres violations de la Convention, comme le retrait à Novaïa Gazeta "de son autorisation de publication et du blocage de l'accès à ses sites internet", "l'enfermement" de suspects "dans une cage de métal et un box vitré exigu" lors d'audiences relatives à leur détention ou encore des "perquisitions injustifiées".

Moscou devrait en théorie verser à chacun des requérants jusqu'à 7.500 euros au titre du dommage matériel et jusqu'à 850 euros pour frais et dépens.

La Russie a été exclue du Conseil de l'Europe en mars 2022, après l'invasion de l'Ukraine, et n'est plus membre de la Convention depuis septembre 2022 mais reste comptable des violations commises jusqu'à cette date.

La CEDH est chargée de veiller au respect de la convention européenne des droits de l'homme dans les 46 pays signataires.

A.Clark--AT